Houei-nêng
Sixième patriarche du tch'an
( 638 ~ 28 août 713 au monastère Pao-lin-sseu sur le mont Ts'ao-k'i )
Texte relatant l'envoi par le doyen Chen-sieou de son disciple Tche-teng au monastère Pao-lin-sseu afin qu'il lui rapporte quelle différence il y a entre son enseignement du tch'an et celui du sixième patriarche Houei-nêng.
Chen-sieou disait : « La méthode de Houei-nêng est prompte et directe. Pourquoi vous attarder ici ? » Un jour, il
prit à part son disciple Tche-teng et lui dit : « Toi qui es intelligent et dont les connaissances sont multiples, va donc au
Ts'ao-k'i, rends hommage au maître et écoute son enseignement, sans lui dire que c'est moi qui t'envoie. Souviens-toi bien de ce
que tu auras entendu afin de pouvoir me le rapporter. Ainsi, je verrai qui de lui ou de moi détient la meilleure
compréhension. »
Tche-teng se réjouit de cette mission. Quinze jours plus tard, il était au Pao-lin-sseu. Il rendit hommage au sixième
patriarche et l'écouta attentivement. Mais il advint que, sous sa parole, il connut l'Éveil et communia avec son esprit
originel. Alors, il se leva, s'inclina et dit tout naturellement :
« Maître, votre disciple vient du monastère Yu-tchuan. Sous mon maître Chen-sieou, pendant neuf années, je n'ai pu parvenir
à l'Éveil. Mais, en écoutant votre sermon, j'ai trouvé soudain mon esprit originel. Maître, puis-je solliciter de votre
miséricorde d'être dorénavant mon instructeur ?
- Si tu viens de là-bas, tu es sûrement un espion.
- Lorsque je n'avais pas encore parlé, j'en étais un. Maintenant, je ne le suis plus. »
Alors Houei-nêng l'interrogea :
« J'ai entendu dire que ton maître de dhyâna, lorsqu'il enseigne, ne transmet que discipline, concentration et sagesse.
Qu'entend-il par là ? Dis-le-moi !
- Ne pas mal agir constitue la discipline. Pratiquer le bien est sagesse. Purifier le mental, voilà la concentration. Tel
est l'enseignement au Yu-tchuan. Mais je ne sais pas encore quel est votre point de vue sur ces questions, maître.
- Je n'ai pas, moi, de système. J'agis selon les circonstances et les capacités de chacun. Je tente de délivrer le disciple
de ses liens et d'ouvrir devant lui la terre spirituelle. Affranchie de toute erreur, elle est discipline de la nature propre.
Débarrassée de tout trouble, elle est concentration de la nature propre. Libérée de l'ignorance, elle est sagesse de la nature
propre. Discipline, sagesse et concentration, telles que les enseigne ton maître, sont destinées à des élèves à la
compréhension limitée. Mon enseignement s'adresse à des êtres supérieurs. Ceux qui n'ont pu s'éveiller par eux-mêmes à leur
nature propre sont incapables d'établir discipline, concentration et sagesse véritables.
- Pourquoi, maître, ne peuvent-ils les établir ?
- Seuls ceux qui ont réalisé leur nature propre, se référant sans cesse à la sagesse innée, sont détachés de tout concept,
aussi n'ont-ils rien à établir. Ils ont toute liberté d'aller et de venir. Ils peuvent utiliser tel système, ou se dispenser de
tout système. Ils agissent spontanément de manière appropriée, quelles que soient les circonstances. La nature propre est
subite ; pratique et réalisation sont immédiates, établir est graduel. C'est pourquoi je dis qu'il n'y a rien à établir. »
Tche-teng se prosterna. Il ne quitta plus le mont Ts'ao-k'i.
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