Le Postier (p 75 aux Éditions Grasset)
Cette turne sur la colline respirait la mort. Je l'ai su le premier jour où j'ai poussé la porte-moustiquaire
pour aller dans le jardin derrière. Un son zinzinant rebondissant vrombrissant bourdonnant est venu droit sur moi :
10 000 mouches se sont élevées dans les airs toutes en même temps. Tous les jardins avaient des mouches comme ça - il
y avait ces hautes herbes vertes et elles créchaient là-dedans, elles adoraient ça.
Oh nom de Dieu, j'ai pensé, et pas une araignée à moins de 5 miles !
Comme je restais planté là, les 10 000 mouches ont commencé à redescendre du ciel, s'installant dans l'herbe, le
long de la clôture, par terre, dans mes cheveux, sur mes bras, partout. Une des plus gonflées m'a piqué.
J'ai laché un gros mot et suis sorti m'acheter la plus grosse bombe de tue-mouches que vous ayiez jamais vue. Je
les ai combattues pendant des heures, enragés, qu'on était, les mouches et moi, et bien des heures plus tard, toussant
et malade à force de respirer le tue-mouches, j'ai regardé autour de moi et il y avait autant de mouches qu'avant. Je
crois bien que pour chaque mouche que je tuais elles allaient dans l'herbe et en fabriquaient deux. J'ai abandonné la
partie.